Vendredi après-midi, nous allions à la remise des prix qu’organisait la commune de Cornimont pour présenter les différentes créations réalisées par les écoles. Nous nous associons depuis quelques années à cet évènement et avons proposé un conte s’intitulant « Juste et le secret de Noël ». Celui-ci au travers d’une histoire basée sur le thème du secret, narre les aventures de Violette dont Juste est amoureux. L’écriture reprend des thèmes chers aux résidentes qui ont écrit l’histoire, comme Noël et la St Nicolas par exemple, mais aussi des préférences pour un parfum, une recette, un bijou….

Voilà le conte qui vous apportera un bon moment de lecture….

 

JUSTE ET LE SECRET DE NOËL

IL était une fois, dans un village de la plaine des Vosges, l’histoire d’une petite fille, VIOLETTE qui était la plus belle de toute la contrée et celle d’un petit garçon, JUSTE qui faisait le désespoir de ses parents tant il était laid ! …

A la naissance de VIOLETTE, la sage-femme qui l’avait mise au monde avait été surprise par la prunelle de ses yeux aux teintes mauves qui conféraient une nuance bleutée comme le crépuscule d’un jour au printemps… Ses lèvres étaient parfaitement ourlées dessinant une symétrie qui donnait à sa bouche la forme d’un cœur généreux de sourires enjôleurs. Ses parents étaient émerveillés par le caractère que cette enfant développait au fil du temps et qui s’apparentait à son visage si doux et empli de beaux et bons sentiments. Son cœur était si grand que toutes les personnes du village passaient régulièrement une partie de leurs loisirs à se confier à VIOLETTE qui avait le sens de l’écoute et apportait réconfort aux âmes qui étaient en quête d’espoir….

Pour tout dire, elle faisait l’unanimité auprès des gens du village qui la voyaient grandir toujours aussi charmante et bonne pour les autres.

A l’opposé de ce même village, il y avait JUSTE …..Il était né un soir de brouillard qui présageait une naissance bien morne en cette météo peu propice à la venue heureuse d’un enfant. Ses parents avaient espéré enfin voir surgir du ventre de la maman la fille qu’ils espéraient depuis toujours…. Hélas, un garçon pointait le bout de son nez qui surmontait un visage fripé, à la peau moite et mordorée de couleurs bien peu pouponnes…. Sa bouche déformée dévoilait ce que l’on appelait à l’époque un« bec de lièvre » : une malédiction qui s’abattait sans crier gare sur la pauvre âme qui en héritait. Ses quelques cheveux rares et mouillés faisaient entrevoir la couleur à venir qui laissait présager un orange-carotte, ce roux qui n’aurait à priori jamais le charme du blond vénitien. Déçus, les parents avaient pensé que ce n’était pas juste et c’est ainsi qu’il l’appelèrent JUSTE !

A l’inverse de ce physique ingrat, Juste était de bonne façon, comme on le dit dans les Vosges,  : courtois, sympathique, très proche des gens du village tout en restant discret…Sa générosité de cœur, il ne l’affichait pas…Il lui arrivait de donner de son temps auprès de personnes âgées de l’Ehpad voisin comme il pouvait faire don de coquettes sommes d’argent à des œuvres caritatives sans que personne n’en sache rien. Bref, il était une « belle personne » de l’intérieur, tout simplement !

Le temps passant, les deux jeunes gens avaient l’occasion de se croiser régulièrement lorsqu’ils allaient à la boulangerie, certains matins….Elle était si belle que lorsqu’il l’apercevait ses jambes semblaient se dérober sous son poids….Il était fasciné par cette grâce et ce sourire pour lequel il aurait donné tout ce qu’il possédait tant une véritable bonté en émanait… Ils se rencontraient, échangeant quelques paroles de politesse au sujet de la météo ou du jour à venir….

Depuis toujours, le cœur de Juste ne battait que pour VIOLETTE; conscient de son apparence physique, il n’osait lui avouer son amour qui demeurait son SECRET que, comme son nom l’indique, il n’avait au grand jamais confié à personne… Comme il aurait aimé lui avouer ses sentiments…Plus le temps passait et plus il se languissait….C’est bien lourd à porter, un SECRET

Un jour, alors que JUSTE partait travailler, il passa devant chez la fleuriste et aperçut un bouquet de ces fleurs si romantiques que sont les pensées….Quoi de mieux que cela pour lui indiquer de manière anonyme qu’il pensait à elle…? Il acheta en toute discrétion un de ces bouquets et alla le déposer à la poignée de porte de sa dulcinée sans qu’elle n’en sache rien…. Lorsqu’elle rentra chez elle au déjeuner, elle découvrit les fleurs et se demanda qui avait eu cette si gentille attention…Elle imagina que c’était une amie qui lui avait déposés…

A une autre occasion, le jour de sa fête, la boulangère apporta à VIOLETTE un ballotin de chocolats dont elle ignorait la provenance, celui-ci ayant été commandé à distance…Mais qui pouvait donc lui offrir ces présents ?? Un bouquet de fleurs, des chocolats…C’était forcément une personne qui la connaissait car ceux-ci étaient de ses préférés….Un amoureux transi? Il y en avaient quelques uns qui l’avaient convoitée mais cela ne lui disait pas, tout du moins, pour le moment…

Le jour de son anniversaire, elle reçut par la poste, un flacon de parfum… En l’ouvrant, le nom indiquait «La vie est belle..»; un parfum de marque…!!!!! Là, c’en était trop…Il fallait absolument qu’elle sache QUI lui faisait tous ces cadeaux sans se déclarer…..?!? Une fois de plus, un de ses parfums préférés…Comme les chocolats! Stupéfaite par ce qui se passait, elle alla rendre visite à sa meilleure amie qui dut jurer qu’elle n’y était pour rien…Elles en conclurent que cela devait provenir de l’un des bellâtres des lieux environnants…

Et les jours passaient…L’année se déroulait et régulièrement, les matins, sur le chemin de la boulangerie VIOLETTE apercevait JUSTE qui lui semblait changé…..Désormais, il portait un costume de couleur bleue bien âpreté qui lui allait comme un gant! Son teint cireux semblait s’éclaircir mais elle se dit que la lumière du printemps illuminait l’ensemble…Quoi qu’il en soit, elle le regardait sous un autre angle…Il aurait presque attiré l’attention s’il n’avait été si peu gâté par la nature depuis l’enfance…Son visage déformé faisait oublier cette nouvelle aura qu’il dégageait…

L’automne arriva avec ses jours se couvrant de cette chape de brouillard bien spécifique à la plaine des Vosges…Les feuilles des arbres tombaient et les frimas de l’hiver arrivèrent à grands pas.

VIOLETTE pensait à NOËL…. Elle serait seule, cette année… Les circonstances faisaient que ses parents étaient allés s’installer à Gruissan depuis fin octobre et sa meilleure amie partait rejoindre son frère à l’étranger. Oh!… De beaux Noëls, elle en avait vécus tous les ans et ce n’est pas un réveillon en solitaire qui l’effrayait… Elle irait à la messe de Minuit que le nouveau prêtre avait organisée à l’heure dite, c’est à dire, Minuit !!

Décembre et la St Nicolas était déjà là: le défilé avait réuni les gens des hameaux voisins. Le pain d’épices et le vin chaud que les mains enveloppaient au travers du verre réchauffaient le corps. Quelle belle tradition que ce père fouettard qui mettait en garde du boucher les enfants désobéissants avec leurs parents…! Au retour de la fête, VIOLETTE remarqua qu’un petit paquet pendouillait à sa clenche de porte….Il était serti d’un nœud rouge et pesait si peu qu’elle faillit le faire tomber en le décrochant…. Encore un don qui lui était fait ? Elle redoutait à l’ouvrir ne sachant ce qu’elle y découvrirait….Intriguée, elle défit le nœud et découvrit un écrin…C’était un bijou….Dès qu’il s’ouvrit, une lumière étoilée apparut…. Un petit papier accompagnait l’ensemble; dessus, elle lut Baccarat!! Du cristal de Baccarat…Elle n’en croyait pas ses yeux….Nous n’étions pas à la Noël et un joyaux semblait tombé du ciel… Son cœur se mit à battre la chamade….Une vague d’émotion la submergeait et qui lui faisait penser que si elle savait qui la gâtait de la sorte, eh bien, elle en tomberait bien aisément amoureuse…Et dire, qu’elle avait failli le faire tomber….Du cristal ! C’était un cadeau magnifique que cette étoile étincelante au bout de sa chaîne…Elle le passa autour du cou et fut étonnée de la splendeur de ce bijou….Il lui allait à merveille faisant ressortir la prunelle violine qui caractérisait la douceur de son regard….

Elle songea aux deux prétendants qui lui avaient fait une cour bien pesante : Jérôme, le radin qui lui avait laissé payer la totalité de l’addition lorsqu’il l’avait invitée au restaurant et Robert, le gougeât qui n’avait parlé que de chasse lors de leur rencontre, à elle, qui adorait les animaux… ! Du temps perdu à ses yeux et elle priait que ce ne soit aucun de l’un d’eux qui aurait pu se mettre en tête de la reconquérir en lui offrant moult cadeaux….Rien que la pensée la mettait mal à l’aise…

Il y avait une boucherie dans ce village qui était tenue par Patrice, un enfant du cru qui faisait profiter de ses talents culinaires aux clients qui souhaitaient réserver leur repas pour le réveillon. Il avait concocté un menu qui proposait des plats traditionnels: escargots ou coquilles St Jacques en entrée, dinde farcie ou chapon en plat. Nous étions le 24 décembre, toutes ses commandes avaient été retirées mais, curieusement, deux retardataires manquaient à l’appel et il était bientôt 19 heures….Il avait coutume de fermer boutique un peu plus tard, le soir de Noël et manquaient à l’appel VIOLETTE et JUSTE….Il leva la tête lorsqu’il les aperçut, arrivant chacun de leur côté et son esprit s’évada en pensant que tous deux feraient un bien beau couple… JUSTE avait changé…Il ne savait dire quoi mais en mieux, c’était certain! VIOLETTE était bien jolie couverte de sa capeline à la mode que Thérèse lui avait confectionnée… Tous deux entrèrent dans le magasin à quelques secondes d’intervalle, se saluèrent et les trois compères engagèrent la conversation. Patrice découvrit alors que l’un et l’autre mangeaient seuls car leur famille était ailleurs et fort de son intuition de tout à l’heure, il leur suggéra de manger ensemble en ce soir de Noël qui ne va pas de paire avec la solitude.

A ces mots, VIOLETTE voulant s’adresser à JUSTE, vit en une fraction de seconde la beauté de JUSTE! Son visage était rayonnant, sa bouche était quasi-parfaite pendant que celui-ci, tournant la tête vers elle arborait un sourire magnifique duquel on pouvait ressentir toute la bienveillance qui s’y dissimulait! JUSTE s’était modifié au fil du temps grâce aux cadeaux qu’il avait offert à sa « bien-aimée »; à chaque présent, il s’était embelli progressivement… En réalité, c’était la Fée du Bonheur de sa baguette magique qui avait jeté un sortilège au jeune homme pour le récompenser de toute sa bonté! En discutant avec Patrice, ils se dirent que Noël seul était bien dommage alors qu’à eux deux, il serait festif et décision fut prise de passer le réveillon ensemble et qu’en plus, ils iraient à la messe de minuit! Fait est dit; VIOLETTE partit au bras de JUSTE, chacun leur repas dans une main. La soirée de Noël fut magique: VIOLETTE adorait l’humour de JUSTE qui lui narrait des histoires subtiles, très amusantes. Ils trinquèrent autour d’une coupe de champagne et il sortit un excellent pinot-gris. En être généreux qu’il était, la bûche au chocolat qui comptait plus de deux parts termina le repas. JUSTE rayonnait de ce moment qu’il avait tant attendu: le hasard avait œuvré pour lui et les choses se déroulaient à merveille. La soirée s’acheva et ils décidèrent de se revoir pour partager d’autres moments, ensemble…

Quelques mois plus tard, le prêtre qui avait eu la joie de rencontrer les deux jeunes gens à la messe de Noël célébrait le mariage de la plus belle jeune fille du village et du bel homme qu’était devenu JUSTE, récompensé de toutes ses bonnes actions …Et comme se terminent les contes, « Ils se marièrent et eurent de beaux et bons enfants»….. Pour le meilleur de tous!

Voilà les enfants que s’achève ce conte imaginé lors de l’atelier d’écriture, par un groupe de résidentes, au Couage. Ces dames tiennent vraiment à vous préciser que dans la vraie vie le physique n’est rien face à la bienveillance et la générosité… Croyez-en leur expérience!

Alors, n’est-ce pas Violette qui s’est mise à regarder Juste avec les yeux de l’Amour…?